Le cloud du futur sera-t-il décentralisé?
9 novembre 2018
Le modèle du cloud décentralisé a commencé à émerger l’année dernière et progresse doucement pour s’affirmer petit à petit comme une alternative très sérieuse aux géants Alibaba Cloud, AWS, ou encore Microsoft Azure. La Blockchain est au coeur de ces nouveaux modèles de cloud décentralisé, qui promettent un système à la fois plus efficace, moins coûteux en ressources, et plus équitable.
Qui sont les acteurs du cloud décentralisé ?
2017 et 2018 ont fait émerger de très sérieux acteurs du cloud décentralisé dans plusieurs pays du monde. Parmi eux, on retient bien sûr le Polonais Golem, le Français iExec et l’Américain Dfinity. Le Chinois Xunlei semble avoir un tour d’avance en ayant déjà déployé plus d’un million de serveurs OneThing Cloud chez ses clients, permettant de stocker des données et fichiers personnels sur 1000 petabytes de stockage.
Quel est l’intérêt du cloud décentralisé ?
- Réduire les coûts d’hébergement et d’exécution
L’objectif du cloud décentralisé est de fournir une solution similaire aux clouds centralisés existants comme AWS, tout en parvenant à en réduire considérablement les coûts.
A l’heure actuelle, les deux acteurs les plus avancés sont Xunlei et iExec, spin-off de l’INRIA ayant lancé sa plateforme en novembre 2017. iExec se présente comme une place de marché de la puissance de calcul, et permet à tous les utilisateurs d’acheter et vendre leur puissance de calcul en peer-to-peer comme une véritable marchandise. Basé sur un système entièrement libéral laissant place au développement de la concurrence, le cloud d’iExec permet aux développeurs d’applications décentralisées d’héberger leurs dApps et d’exécuter leurs smarts contracts Ethereum à des prix intéressants et de plus en plus compétitifs au fur et à mesure que de nouveaux fournisseurs rejoindront la plateforme.
La solution permet également de contourner les problèmes de scalabilité du réseau Ethereum, qui n’offre pas suffisamment de puissance de calcul pour exécuter efficacement l’ensemble de ses dApps.
iExec met à disposition des éditeurs un SDK pour leur permettre de créer des applications directement sur la plateforme. A l’heure actuelle, le dAppstore iExec présente environ 40 applications. Depuis juillet, la start-up franco-chinoise présente chaque semaine la « dApp of the week » pour améliorer la visibilité des meilleurs projets : BirdieBlue, Websensors, Cerebrum, SLAM Robots...
Aujourd’hui, un des enjeux principaux est de chercher à tisser des partenariats avec différents fournisseurs de puissance de calcul pet de proposer ainsi une offre suffisamment importante sur la marketplace. iExec travaille pour l’instant notamment avec Genesis Mining (cloud mining), Stimergy (chaudières connectées) Cloud&Heat (cloud privé) ou encore Oarnot Computing (serveurs-radiateurs).
- Améliorer la sécurité de l’hébergement
Outre la baisse des coûts d’utilisation, le cloud décentralisé représente un avantage non négligeable, en particulier lorsque celui-ci est basé sur une blockchain : il s’agit bien sûr de la sécurité du stockage et/ou de l’exécution des données.
Sur iExec, le mécanisme de consensus blockchain est la Proof of Contribution et repose sur un protocole off chain. Chaque éditeur verse une caution, puis se voit attribuer un score de réputation en fonction de sa capacité à délivrer correctement un service cloud. Chacun ne récupère sa caution qu’à condition d’avoir délivré son service avec succès.
Malgré tout, la nature distribuée d’un cloud décentralisé représente un réel challenge en termes de sécurité. Pour adresser ce problème, iExec a optimisé sa plateforme pour utiliser des Intel SGX, qui permettent l’exécution des codes et des données dans des enclaves protégées. La start-up développe aujourd’hui avec Intel SGX une solution complète end-to-end intégrant la technologie SGX pour leur cloud décentralisé. Ce dispositif permet de garanti que chaque dApp soit exécutée correctement et que chaque donnée soit traitée comme attendu sans que quiconque n’y ait accès et puisse la falsifier, y compris son propriétaire. iExec collabore également avec d’autres fournisseurs de SX, comme Scone et Fortanix.
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Le cloud décentralisé, un déploiement complexe
Si le cloud décentralisé ouvre les portes à un écosystème plus concurrentiel, plus juste, et aussi plus vert, celui-ci reste nettement plus complexe à mettre en place qu’un cloud centralisé. Ce défi technique exige de lourds investissements, estimés pour l’instant à 100 millions de dollars en R&D pour l’entreprise Xunlei depuis 2014.
Pour pouvoir héberger une application sur un cloud décentralisé, les workloads doivent être éligibles à une architecture de calcul réparti. Le cloud décentralisé n’est donc pas toujours adapté à toutes les applications, car parfois difficile à mettre en place. On retrouve cependant ce type d’architecture dan divers projets : la prédiction financière, l’IA d’apprentissage (où le marché potentiel est extrêmement étendu), ou encore le rendu graphique.
Les traitements sont bien entendus plus complexes que dans le cas d’une infrastructure informatique centraliser, et certains environnements web seront également beaucoup plus difficile à distribuer.
La progression des technologies de registres distribués
Malgré cette complexité, les systèmes de registres distribués (au delà du domaine du cloud), connaissent un tel essor depuis deux ans que nous sommes aujourd’hui en mesure de nous demander si l’économie de plateforme telle que nous la connaissons aujourd’hui pourra perdurer dans les 10 ou 20 années à venir. Le web décentralisé a toutes ses chances de progresser autant que le cloud décentralisé, face à un rejet croissant des dérives oligopolistiques – voire monopolistiques – des géants du marché.
Aux côtés de Golem, Siacoin, iExec, Sonm, Dfinity et Xunlei, les plateformes décentralisées comme OpenBazaar, Spheris, et les réseaux sociaux comme Steemit ou Kuende posent ensemble les bases d’un nouvel écosystème où les milliardaires du web n’ont plus leur place et les coûts intermédiaires s’en retrouvent drastiquement diminués.
S’il serait totalement illusoire d’en prédire la fin imminente des GAFA, on peut cependant souligner un basculement net vers un changement de paradigme et un encouragement de plus en plus poussé de la libre concurrence et la levée des barrières à l’entrée.
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